Récepteur à réaction : Tubes ou transistors ? À vous de choisir !
Voici la description de deux récepteurs à réaction, l'un à tubes
l'autre à semi-conducteurs. Ces récepteurs sont prévus pour la
réception des bandes amateurs décamétriques, pour la réception des
émissions en bande latérale unique (BLU, SSB). Pour changer de bande,
il faut changer un circuit oscillant avec son circuit de réaction fixée
sur une fiche DIN. En réalisant d'autres bobinages que ceux décrits, il
est bien entendu parfaitement possible de recevoir les bandes de
radiodiffusions. Les stations de radiodiffusions émettent en modulation
d'amplitude avec des puissances extrêmement importantes. Leur réception
est donc plus facile que celle des stations radioamateurs.
Le principe des récepteurs à réaction a été découvert en 1912 par Edwin
Armstrong, suivie d'un brevet en octobre 1914. Il s'agissait d'un
procédé simple permettant d'obtenir un gain extrêmement important à
partir d'une lampe (tubes électroniques) n'ayant qu'un faible gain. En
1933, des mesures expérimentales ont montré qu'il était possible
d'obtenir un gain de 5000 en appliquant les techniques de la réaction à
une lampe ayant un gain de 9 sans réaction (Robinson HA,QST, février
1933, p27). Jusqu'au début des années 30, la quasi-totalité des
récepteurs comportait cette technique de la réaction afin d'augmenter
la faible amplification obtenue avec des lampes de l'époque. À côté de
ce gain extrêmement important, les récepteurs à réaction permettent de
démoduler les émissions en modulation d'amplitude (AM), mais aussi en
bande latérale unique (BLU, SSB). Aujourd'hui, il est encore possible
d'entendre avec des récepteurs relativement simples des radioamateurs
de Nouvelle-Calédonie ou d'Australie en BLU sur 20 m. J'ai
personnellement réalisé plusieurs QSO bilatéraux avec l'Amérique du
Nord en employant les deux récepteurs à réaction décrits dans cet
article, un émetteur de fabrication OM (100W) et une antenne Lévy de
2x10 m sur 21MHz et 18MHz.
Principe de la réaction
Le principe de la réaction consiste à réappliquer une partie du signal
de sortie d'un amplificateur à l'entrée de celui-ci. Ce signal
réintroduit à l'entrée de l'amplificateur est à son tour amplifié ce
qui augmente nettement le gain de l'étage. D'un point de vue théorique,
on peut ainsi arriver un gain infini. L'amplificateur se met alors à
osciller. C'est l'accrochage. En pratique, il faut régler le circuit de
réaction juste avant l'accrochage pour la réception des stations
modulation d'amplitude et juste après l'accrochage pour les stations en
BLU ou télégraphie (CW), la fréquence émise par le circuit à réaction
reconstituant alors la porteuse manquante pour les stations BLU et
permettant de décoder la télégraphie par interférences. Dans la très
grande majorité des cas, la réaction de fait au niveau de l'étage
détecteur (démodulateur).
Effet de la réaction.
La réaction permet d'augmenter très fortement le gain d'un étage
amplificateur. Si on place dans le circuit de réaction un circuit
sélectif, le gain d'amplification se fera essentiellement sur la
fréquence d'accord de ce circuit. La sélectivité est donc extrêmement
augmentée au voisinage de l'accrochage. En pratique, le circuit
sélectif sera un simple circuit oscillant constitué d'une bobine et
d'un condensateur (circuit LC).
Couplage de l'antenne
L'antenne peut être couplée directement au circuit oscillant du
récepteur. Cependant, cela aboutit plusieurs défauts qui dégradent les
performances de ces postes. D'abord, il s'agit d'un amortissement
important apporté au circuit oscillant. Il s'ensuit une baisse de
sensibilité et de sélectivité. Le deuxième défaut et de dégrader la
stabilité en fréquence. En effet, sous l'influence du vent l'antenne
bouge ce qui fait varier la capacité entre l'antenne et la terre ce qui
modifie donc l'accord du circuit oscillant. Le troisième défaut et le
risque de ronflement en accroché au-dessus de 10 MHz. Il faut donc
mettre un étage amplificateur entre l'antenne et le circuit oscillant.
Cet étage amplificateur sera à large bande pour faciliter son montage.
Il doit toujours travailler en dessous du seuil de saturation et être
le plus linéaire possible. Les transistors bipolaires étant peu
linéaires, une contre-réaction est impérative pour obtenir de bons
résultats. Un potentiomètre à l'entrée de l'étage amplificateur est
indispensable pour diminuer le phénomène de saturation. Cet
amplificateur apériodique doit enfin avoir un faible niveau de souffle
et une amplification importante en HF (fréquences 3 MHz à 30 MHz).
Stabilité en fréquence
La réception de la BLU impose une stabilité en fréquence meilleure que
100 Hertz. Si on compare ces 100 Hertz aux 14 000 000 Hertz
sur la bande des 20 m, on conçoit facilement que cette stabilité en
fréquence soit difficile à atteindre. Pour y parvenir, il faut
respecter un certain nombre de critères :
- Une construction mécanique rigide.
- Une face avant du récepteur en cuivre ou aluminium relié à la masse pour éviter l'effet de main.
- Une alimentation régulée pour l'ensemble du récepteur.
- Une absence de commutation du circuit oscillant. En pratique, cela
n'est pas possible. En effet, il faudrait un condensateur variable par
bandes de fréquences à recevoir. Le montage ne comportant qu'un seul
condensateur variable sera mis en série avec une faible capacité dont
la valeur sera choisie pour couvrir juste la bande de fréquences
désirées. Le circuit oscillant sera construit sur une fiche DIN et
comportera les bobines et tous les condensateurs fixes.
- Composants de première qualité pour minimiser les pertes et les
variations dans le temps. Les bobines sont construites avec du fil de
diamètre important et les condensateurs fixes seront obligatoirement
des condensateurs NPO. Les condensateurs ajustables doivent être de
bonne qualité. Il faut éviter les modèles chinois bas de gamme.
- Utilisation de capacités fixes d'accord de fortes valeurs (faible
rapport L/C). À titre indicatif il faut employer une capacité d’accord
de plus de 500 pF pour obtenir, dans mon expérience, une bonne
stabilité, ce qui est réalisable jusque 21 MHz. À noter pour un montage
tube, plus la pente de la lampe choisie est élevée, plus il est
possible d'employer des capacités importantes.
Bruit de fond
Les récepteurs à réaction, comme tous les récepteurs, sont confrontés
aux sources habituelles de bruit. Cependant, il existe deux sources de
bruit spécifique des récepteurs à réaction et des récepteurs à
conversion directe.
- Ronflement en accroché sur les bandes de fréquences élevées (< 10
MHz). Ce ronflement est appelé tunable hum par les Anglo-Saxons. Son
explication est simple. En accroché, le circuit oscillant émet une onde
dont la fréquence correspond à la fréquence à recevoir. Cette onde est
modulée en 50 Hertz par l'une des multiples alimentations secteur
situées à proximité du récepteur. Le câble de ces alimentations sert
d'antenne. L'onde modulée en 50 Hertz revient aux récepteurs à réaction
en superposant à la station à recevoir une violente modulation 50
Hertz. Un étage à chef est indispensable pour minimiser cette source de
ronflement. Les diodes des alimentations à proximité du récepteur
doivent toutes être mises en parallèle avec un condensateur
d'approximativement 10 nF. Dans l'idéal, l'ensemble du récepteur
devrait être blindé. À défaut, au-dessus de 10 MHz, il faut employer
des bobinages de petit diamètre qui rayonneront moins que des bobinages
de grand diamètre.
- Induction du bruit du secteur sur la grille ou la base du détecteur à
réaction. La grille de la lampe détectrice à réaction ou la base du
transistor détecteur à réaction présente une haute impédance pour les
courants de 50 Hertz. La minime capacité entre les fils parcourus par
du 50 Hertz et la connexion de grille ou de base est suffisante pour
amener une tension 50 Hertz relativement importante. Cette connexion de
grille ou de base doit être la plus courte possible. De plus, il faut
essayer de diminuer au maximum l'impédance pour le courant 50 Hertz.
Pour un tube, la résistance de grille doit donc être la plus faible
possible qui permette une amplification suffisante. Pour un transistor,
la base doit être reliée au circuit oscillant par un condensateur ayant
une faible impédance pour les courants de 50 Hertz. En pratique, sa
valeur sera proche de 0,1 µF (100 nF).
Montages retenus
J'ai voulu réaliser deux montages. L'un à tubes, l'autre à transistors.
Le montage à tube devait ressembler le plus possible aux montages
anciens, j'ai donc choisi d'employer des lampes octales. Le schéma
synoptique du récepteur est identique pour les deux techniques :
amplificateur apériodique, étage détecteur à réaction, deux étages
amplificateur basse fréquence.
Particularités du récepteur à tubes
La lampe 6AC7 a été choisie en amplificatrices RF et détectrice, car il
s'agit de la lampe octale ayant la pente la plus élevée. Cette lampe a
aussi été fabriquée en Russie sous la référence 6j4 (6Ж4) qui est
nettement moins chère que la production américaine pour une qualité
similaire. La lampe 6SL7 a été choisie en amplificatrices AF, ayant un
coefficient d'amplification élevée, bien supérieur à celui de la 6SN7.
Là encore il existe une version russe de bonne qualité 6N9S (6N9C). Le
câblage des filaments se fait avec deux fils, un fils étant relié à une
tension positive proche de 40 V. Cela diminue nettement le bruit de
fond 50 Hertz de la détectrice. En effet, avec un branchement
conventionnel à seul fil, lors de la demi-alternance négative, certains
électrons quittent le filament pour parvenir à la connexion de grille
qui est positive à ce moment-là. La valeur de 220 kohm pour la
résistance de grille de la détectrice est relativement basse par
rapport au schéma classique afin de diminuer le ronflement à induction
du courant secteur. La faible valeur du condensateur de grille (8 pF)
évite que la lampe se mette à osciller en basse fréquence en accroché.
Le condensateur variable de 365 pF est démultiplié dans l'axe (trois
tours). Cela est insuffisant pour un réglage facile en BLU. Un réglage
fin est donc assuré par des diodes 1N4007 qui servent de varicap. La
self de choke VHF dans le circuit de grille de la première 6AC7 évite
des auto oscillation de cette lampe. La résistance de 100 ohm est à
adapter en fonction de l'antenne. Cette valeur convient bien pour une
antenne d'émission présentant une impédance de 50 ohm. L'écoute se fait
exclusivement au casque. La haute tension doit obligatoirement être
régulée à 120 V.
Particularités du récepteur à transistors
Les diodes1N4148 ne servent qu'à protéger le récepteur lorsqu'il est
employé à côté d'un émetteur. Si ce n'est pas le cas, il faut les
supprimer, car elles augmentent un peu la transmodulation. Remarquez la
contre réaction sur le transistor RF avec la résistance de 10 kohm et
le condensateur de 10 nF. Les deux condensateurs de 100 pF qui font
partie du circuit oscillant, mais qui ne sont pas sur la fiche DIN
doivent être câblés de façon très courte. La connexion entre la
résistance de 22 kohm et le transistor BC547C doit être extrêmement
courte (moins de 2 cm) pour éviter le ronflement secteur. Comme pour le
récepteur à tube un vernier par « varicap » est prévu.
Réalisation pratique
Les deux récepteurs sont fabriqués sur des plaques de bakélite cuivrée.
L'une de ces plaques est horizontale, l'autre verticale pour servir de
face avant. Pour le récepteur à tubes, les plaques mesurent 20/30
centimètres. Pour le récepteur à transistors, les plaques mesurent
15/20 centimètres. La plaque horizontale est fixée sur un U en bois, la
plaque verticale au support en bois et à 2 équerres. Les photographies
montrent l'assemblage pratique. Pour le récepteur à tube, aucune source
de haute tension ne doit être accessible au-dessus du récepteur pour
éviter les risques d'électrocution. Pour effectuer des points de
connexion, il faut employer des résistances de 10 Mohm 1/2W si
nécessaire torsadées par deux. Les connexions à l'antenne, au casque et
aux alimentations se font par fiches bananes de 4 mm.
L'utilisation de bobines interchangeables réalisées avec des fiches DIN
4 broches permet d'obtenir un excellent rendement. Il est en effet
facile de comparer 2 circuits oscillants pour la même gamme, d'ajouter
une nouvelle gamme non prévue au départ, etc. Au-dessus de 10 MHz, les
bobines du circuit oscillant sont réalisées avec du fil électrique
d'installation de 20 A (2,5 mm²). Les bobines d'entretien ou les
bobines du circuit oscillant pour une fréquence inférieure à 10 MHz
sont réalisées avec du fil mono brin isolé de PVC de 0,2 mm² (diamètre
du conducteur 0,5 mm, diamètre du câble avec l'isolement PVC 1 mm).
Pour aider les bobines en fil électrique d'installation à rester bien
jointives, il faut torsader à deux endroits différents du bobinage un
morceau de fin fil électrique qui entoure les spires. Ces bobines sont
soudées directement à la fiche DIN. Pour les circuits oscillants
réalisés avec du fil plus fin, il faut souder un fil électrique de 20 A
à la fiche DIN. La bobine y est attachée avec un petit fil. Pour le
récepteur à tube, la bobine d'entretien est attachée directement à la
bobine du circuit oscillant par un fin fil torsadé. Le condensateur
ajustable et les condensateurs fixes sont soudés directement sur la
bobine et la fiche DIN. Des fiches à 4 connexions sont suffisantes. La
première connexion sert pour la masse, la seconde pour le point chaud
du circuit oscillant, la troisième pour le condensateur variable est la
quatrième pour la bobine d'entretien (récepteur a tube). Les gabarits
pour faire les bobines sont un crayon de 9 mm de diamètre, un feutre de
15 mm de diamètre, et une lampe noval de 22 mm de diamètre. Quand
tout est au point, les spires des bobines sont collées avec de la colle
cyanolite.
Les bobines doivent être séparées d’au moins 5 cm des lampes du fait de
leur température élevée. La même distance de 5 cm doit être respectée
avec le panneau avant. En effet, ce panneau se déforme légèrement quand
on le touche ce qui aboutit à une variation de capacité si la bobine
est trop proche. Pour la même raison, le condensateur variable doit
être fixé sur la plaque horizontale. Enfin, pour améliorer la rigidité,
il faut souder les 2 plaques à leur zone de contact. Le condensateur
variable doit être démultiplié, si possible sur 3 tours
(démultiplication par 6, le condensateur variable n'ayant qu'un
demi-tour).
Un schéma d'alimentation régulée 120V réalisée avec des composants modernes est donné à titre d'exemple.
Circuits oscillants Rx Tubes
Bande Diamètre L1
L2 Capacité parallèle pF Capacité
série pF
10m 9mm
2 7 220+82
47
15m 9mm
2 8 470+100+47
22
17m 15mm
2 6 470+22
22
20m 9mm
4 8 470+220+47
33
40m 22mm
5 5 470+47
47
80m 22mm
10 7 470+100+33
220
Circuits oscillants Rx transistors
Bande Diamètre L Capacité parallèle pF Capacité série pF
10m 9mm
2 220+82
22+4
15m 15mm
2 330+82
22
17m 15mm
2 470+100+47 8+8
20m 22mm
2 330+220+82 33+8
40m 22mm
5 470+82
47+8
80m 22mm
11 470
100+22