RECEPTEUR A REACTION A ANTENNE CADRE
Olivier ERNST F5LVG
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L'originalité de ce récepteur est de permettre l'écoute des ondes courtes sur un récepteur à réaction, sans aucune antenne extérieure par l'emploi d'un cadre. Il est adapté à la radiodiffusion, comme au radioamateurisme.
Jusqu'au début des années soixante-dix, la détectrice à réaction était le récepteur type du débutant. Ce montage présente en effet une bonne sensibilité et permet de démoduler l'AM, la BLU, et la CW. Son utilisation a disparu avec les semi-conducteurs. L'emploi des transistors nécessite en effet une excellente compréhension de ce type de récepteur, des oscillateurs et des caractéristiques des semi-conducteurs pour retrouver un montage simple et efficace. Les résultats sont alors bien meilleurs qu'avec les anciens montages à tubes. Avec le montage décrit j'ai pu recevoir en BLU, sur 20 m, la Nouvelle-Calédonie et l'Australie !
Un montage à réaction consiste en un amplificateur dont une partie du signal de sortie est réappliqué à l'entée de façon à compenser les pertes du circuit d'entrée. Si le circuit d'entrée consiste en un circuit oscillant, son coefficient de qualité Q augmente alors fortement. La sélectivité du circuit augmente donc aussi de façon importante. Le gain de l'amplificateur s'accroît également, pouvant théoriquement devenir infini. Les explications théoriques sont données à la fin de l'article. Quand les pertes sont complètement compensées, le montage se met à osciller. On dit que le montage accroche. Au-delà de l'accrochage, l'amplificateur fonctionne en oscillateur. En pratique, pour la détection de la modulation la sensibilité est maximale juste avant l'accrochage. Pour la démodulation de la BLU il faut passer l'accrochage. L'onde créée par l'amplificateur remplace alors la porteuse supprimée à l'émission. Au-delà de l'accrochage, il se crée des battements audibles avec les ondes de télégraphie ce qui permet leur démodulation. A l'inverse, la modulation d'amplitude devient inaudible du fait de ces battements avec l'onde porteuse aboutissant à des sifflements insupportables.
Une des difficultés des montages à réaction est le couplage de l'antenne. A partir d'un couplage donné, pour augmenter la sensibilité, il faut augmenter le couplage. Les pertes dans le circuit oscillant augmentent alors, ce qui diminue la sélectivité et l'augmentation de sensibilité attendue. En pratique les choses se compliquent encore, l'impédance d'une antenne variant avec la fréquence. Le moyen habituel pour éviter ce problème est d'utiliser un étage HF. Un autre moyen plus simple est d'employer une antenne cadre, c'est à dire une bobine de grand diamètre, 16 cm dans notre récepteur. L'amortissement du à l'antenne disparaît alors. Par ailleurs, la sensibilité d'une antenne cadre accordée est directement proportionnelle à son coefficient de qualité. La réaction permettant d'augmenter artificiellement ce coefficient de qualité, on conçoit que la sensibilité d'un montage à réaction sur antenne cadre puisse être quasiment identique à celle obtenue avec une véritable antenne de dimension nettement plus importante.
Le choix du transistor effectuant la réaction est critique. Ce transistor fonctionne en HF et en BF. Dans l'idéal, il faudrait un transistor ayant une excellente qualité en HF et en BF, ce qui n'existe pas. Le choix doit donc s'effectuer entre un très bon transistor HF (en pratique un transistor UHF type BFR91A) ou un très bon transistor BF (type BC549C). J'ai choisi le très bon transistor BF (BC549C) qui n'a pas tendance à auto-osciller en UHF avec les circuits parasites des connexions, à la différence du transistor UHF.
R1 R2 : 4.7 Kohm, R3 R4 : 220 ohm, R5 R6 : 1Kohm, R7 : 20 Kohm (potentiomètre 10 tours), R8 : 100 ohm (potentiomètre), C1 : 10 µF, C2 : 200 pF variable, C3 : 100 pF, C4 : 470 pF (20 m) / 1.47 nF (40 m) / 5.17 nF (80 m), C5 : 10 nF, C6 : 22 pF, C7 : 2.2 µF, C8 : 1 µF, C9 C10: 100 µF, C11 : 1000 µF, C12 : 22 µF, C13 C14 : 4.7 µF, C15 100 nF, D1 diode zener 18V 1W, T1 BC549C, Q1 TDA2003, Q2 : regulateur 9V, L2 1 µH, L3 L4 : 1 mH.
L1 bobine d'antenne, diamètre : 16 cm, diamètre du fil 2.8 mm (section 6 mm2). 20 & 30 mètres : 1 tour, 40 mètres : 2 tours, 80 mètres : 5 tours.
Pour diminuer au maximum le ronflement BF induit dans les amplificateurs, il est indispensable que ceux-ci soient attaqués par une faible impédance BF. Ceci explique les valeurs inhabituelles de R6, R8, et C7 dans notre récepteur.
R3 est indispensable pour augmenter l'impédance d'entrée de T1. L2 sert à diminuer le désaccord induit par le réglage de la réaction sur 20 m.
Le taux de réaction est déterminé par le pont diviseur capacitif C3/C4. Le gain de l'amplificateur se règle par R8 qui permet de se placer en deçà ou au-delà de l'accrochage.
Le choix d'une bande de réception s'effectue par le choix de la bobine d'accord L1 et la valeur de C2. L'accord dans une bande donnée s'effectue ensuite par une diode zener employée en varicap.
Le montage a été effectué sur une plaque de bakélite cuivrée de 15 x 20 cm fixée sur une planche de bois de 30 x 40 cm. Les connexions ont été réalisées avec du fil de 1,5 mm2 dénudé et fixé par 2 ou 3 résistances de 10 Mohm à la plaque de bakélite cuivrée. Un fer à souder de 60 ou 80 W est nécessaire. Les potentiomètres R7 et R8 sont fixés chacun sur une équerre à l'opposé de L1 pour éviter l'effet de main. L1 est réalisée en fil de gros diamètre pour obtenir une bonne rigidité mécanique et diminuer les pertes au maximum. Chaque bobine est maintenue par du fil de 1,5 mm2 enroulé entre les 2 connexions de sortie. Sur 80 m, un deuxième enroulement sur quelques centimètres est aussi fait à l'opposé. Pour terminer, un peu de colle cyanolite est versé sur ces petits enroulements. Les 2 fils de connexion des bobines sont soudés à une fiche banane mâle de 4 mm. Les 2 fiches bananes femelles sont fixées chacune sur une équerre de 5 cm fixée par 2 vis à la plaque de bois à travers la plaque de bakélite cuivrée. Il est ainsi possible de réaliser facilement des bobines interchangeables. Un petit commutateur ON OFF ON permet de mettre en parallèle de C4 (470 pF pour le 20 m) une capacité de 1 nF (pour le 40 m) ou 4,7 nF (pour le 80 m). Pour terminer précisons que l'audition s'effectue au casque.
Théorie d'un étage à réaction
Soit un amplificateur de gain en tension égale à 1 pour simplifier, c'est-à-dire n'amplifiant pas (en l'absence de réaction). On lui applique à l'entrée une tension E, on obtient à la sortie une tension S (sans réaction, on a donc S=E). De plus, on réinjecte à l'entrée une fraction r de la tension de sortie, r est calculée en pourcentage de S .Comme le gain de l'amplificateur égale 1, nous avons :
E+rS=S d'où E=S(l -r) donc E=S(1-r) enfin S/E=1/(1-r)=G
Le rapport S/E correspond au gain réel G de l'amplificateur en fonction du taux de réaction. L'amplification dépasse alors 1 et peut devenir considérable, par exemple si r = 99 % (0,99) alors G = 100. Certains réalisateurs ont pu obtenir un gain de 1000 (r = 99,9 %). Quand r=1, le gain devient infini, c'est-à-dire que le montage oscille. On dit alors que le montage accroche.
Le montage réel comprend un transistor monté en collecteur commun. L'entrée se fait donc sur la base et la sortie au niveau de l'émetteur qui est couplé au circuit oscillant par une prise intermédiaire sur la bobine ou par diviseur capacitif comme c'est le cas dans notre récepteur. La place de la prise détermine le taux de réaction r. Comme on ne peut la modifier à volonté, on la règle une fois pour toutes lors de la fabrication, et le taux de réaction est ensuite déterminé par la tension de base du transistor. Au total, le signal amené par l'antenne au circuit oscillant revient via le transistor à celui-ci mais amplifié à volonté.
Caractéristiques d'un montage à réaction
* La sensibilité est excellente. Elle dépend directement du gain et est donc maximale près de l'accrochage (dans notre exemple r = 1). Avec une antenne cadre le gain est encore augmentée de façon indirecte par l'augmentation du coefficient de qualité Q de la bobine. Après l'accrochage, le montage oscille et, en simplifiant, r diminue car l'entrée " capte " tout le signal de sortie. La sensibilité diminue, donc quand on augmente la réaction après l'accrochage.
* La sélectivité dépend aussi directement du taux de réaction. En effet, celui-ci est maximum à la fréquence de résonance du circuit oscillant donnant l'amplification maximale, puis diminue dès qu'on s'éloigne de la résonance, ce qui diminue grandement l'amplification. Pour reprendre notre exemple ; si à la résonance r = 99,9 %, G = 1000. A la fréquence d'atténuation de moitié du circuit oscillant r = 49,95 %, donc G = 1,99. L'atténuation qui est donc de 2 sans réaction devient égale à 500 avec la réaction. Plus le taux de réaction est important, plus la sélectivité est bonne. Cependant, une remarque : si une station très puissante est reçue sans réaction, on ne pourra jamais l'éliminer puisqu'on ne diminue pas le gain en dehors de la résonance. Ce phénomène s'apparente à la transmodulation et explique que des stations de radiodiffusions passent parfois au-dessus des radioamateurs sur 40 m. Ce phénomène est cependant atténué par l'emploi d'une antenne cadre qui présente, en l'absence de réaction, une faible sensibilité.
* La stabilité en fréquence : pour l'écoute de la BLU (et de la CW), il faut se tenir en accroché pour reconstituer la porteuse. On est donc en présence d'un oscillateur qui, pour être stable, doit :
- être accordé par une importante capacité ;
- être le plus faiblement possible couplé à l'antenne, ce qui est faveur d'une antenne cadre ;
- avoir une tension d'alimentation parfaitement stable ;
- avoir une réalisation mécanique rigide.
* Le problème de la synchronisation : quand un oscillateur reçoit une fréquence voisine de la sienne mais plus puissante que celle-ci, la fréquence de l'oscillateur varie pour se rapprocher de celle du signal incident. Ainsi, à l'écoute d'une station CW, si on se place en accroché à 1 kHz de la fréquence émise, lors des maxima de réception dus au fading la fréquence BF obtenue par battement sera plus grave voire infra sonore (inférieure à 25 Hz). Dans ce dernier cas, on dit que l'oscillateur " bloque " car on a l'impression qu'il n'oscille plus (ce qui est faux). Pour minimiser cette synchronisation, il faut accorder l'oscillateur par une forte capacité, diminuer au maximum l'amortissement du circuit oscillant et enfin augmenter la puissance de l'oscillateur en dépassant nettement l'accrochage (la sensibilité diminue alors puisqu'elle est maximale près de l'accrochage).
Le montage à réaction permet donc, avec un seul transistor, une grande sélectivité, une grande sensibilité, l'écoute de la modulation d'amplitude, la BLU et la CW. Il faut cependant que le montage soit bien conçu, tant du point de vu schéma théorique que réalisation pratique et que l'amateur sache régler correctement le taux de réaction. Vu les moyens mis en jeu, les résultats sont alors extraordinaires.
Olivier ERNST F5LVG
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