Ayant découvert la radio à la fin des années 70, j’ai débuté avec des récepteurs de radiodiffusion à tubes d’occasion. Mon premier récepteur pour les bandes amateurs était réalisé à partir de 2 BCL à lampes transcontinentales rouges. Je récupérais le signal à la sortie du deuxième transfo FI du premier récepteur pour l’appliquer à la grille du tube FI du deuxième récepteur. J’avais ainsi à bon marché un récepteur à 2 étages FI. Pour décoder la BLU j’avais construit un BFO avec une lampe ECL80. Dans le même temps je lisais tous les livres de radio présent au radio-club F2OT (F8KOT) et qui résumaient bien la technique radioamateur à tubes. J’avais construit en « fils volants » de multiples détectrices à réaction et même quelques superhétérodynes. Voici quelques temps, l’envie m’est venue de reconstruire des récepteurs à tubes avec ma compréhension actuelle de la radio. Chaque récepteur devait représenter l’optimum de sa catégorie. J’ai commencé par une détectrice à réaction que je vous ai décrit dans Radio-Ref de février 2005. Je crois que cette détectrice à réaction représente bien l’optimum réalisable avec cette technique. J’ai ensuite voulu réaliser un superhétérodyne simple mais performant, dont voici la description. Il n’était pas question de réaliser un monstre à plus de 10 tubes, double changement de fréquence, poids extrêmement lourd etc. Ces récepteurs typiques des années 40 50 et 60 sont très difficilement réalisables de nos jours par manque de composants et même si leur fonctionnement peut être excellent, ils ne correspondent plus au standards modernes en nombre de composants, nombre de points de réglages, poids et volume. Je me suis fixé de faire à un récepteur à nombre de lampes réduit (5 lampes), de réalisation mécanique facile, ayant une bonne sensibilité, une sélectivité adapté à la BLU et une stabilité en fréquence acceptables. Seules 3 gammes ont été retenues : les 20 40 et 80 mètres.
Les récepteurs de radiodiffusion étaient constitués d’un étage changeur de fréquence avec une lampe double, d’un étage FI sur 455 kHz, d’un étage détection pré-amplification, et enfin d’un étage AF de puissance, soit 4 lampes sans l’alimentation. Leur conception n’avait quasiment pas changée pendant 30 ans (1935, 1965), c’est dire leur efficacité. L’idée a donc été de s’inspirer de ce type de schéma et de l’adapter pour les 3 gammes amateurs 20 40 et 80 mètres ainsi qu’à la BLU. Il a été choisi de réaliser le changement de fréquence avec 2 tubes séparés, ce qui permet de choisir des tubes extrêmement performants. Vu le faible nombre d’étage, il faut une lampe ayant un grand gain et peu de souffle. Le choix s’est porté sur l’EF184, pentode à très grand gain pour FI de téléviseurs. Le même tube a été choisi pour l’oscillateur local. De multiples essais ont montré que l’injection de l’oscillateur local dans la cathode du mélangeur était le meilleur compromis en termes d’amplification et de transmodulation. L’injection dans la grille de commande G1 donne un très grand gain, mais la transmodulation est infernale. Le 40 mètres est inaudible le soir. L’injection dans l’écran ou le suppressor donne un très faible gain. Pour éviter les problèmes de fréquences images la fréquence intermédiaire ne peut être sur 455 kHz. Elle a été choisie sur 5,068 MHz car elle ne se situe pas dans une bande de radiodiffusion ou amateur. De plus des quartz de cette fréquence sont facilement disponibles. La sélectivité nécessaire à une réception « single signal » est obtenue par un filtre quartz en échelle. La bande passante dépend de la valeur des capacités reliant les quartz à la masse. Pour l’écoute de la télégraphie il est possible de monter de 22 à 100 pF voir 220 pF mais la téléphonie devient difficile à écouter. Le tube FI est encore un EF184. L’appareil devant démoduler la BLU, un tube double triode (ECC84) a été choisi pour l’étage démodulateur. N’importe quelle double triode novale doit convenir. Une triode sert d’oscillateur de battement, l’autre de détecteur par la caractéristique de plaque. Ce type de détection a été choisi car elle est plus sensible qu’une détection diode et sa grille étant reliée à la masse du point de vue des basses fréquences elle ne crée quasiment aucun ronflement. A noter que le BFO peut être arrêté pour l’écoute de l’AM et qu’une commutation BLI/BLS est prévue. Pour l’amplification AF, il avait été choisi, au début, un seul tube EF184. L’expérience a montré que le gain obtenu était trop élevé pour l’écoute au casque et trop faible pour l’écoute en haut-parleur. Il a donc été remplacé par une triode pentode BF ECL80. Ce tube est le moins performant de la série. Je recommande les ECL82 ECL85 ou autres. Je l’ai employé car j’en possédais quelques exemplaires neufs. Pour obtenir un gain suffisant avec ce tube il est indispensable de n’appliquer qu’une très faible polarisation à la grille de la triode. En pratique il suffit de la relier à la cathode par une résistance de 10 Mohms. Un interrupteur reliant la grille à la masse par une résistance de 47 kohm permet de diminuer nettement l’amplification et d’éviter la saturation du tube pour les stations puissantes, en modifiant la tension de polarisation. Aucun ronflement n’est audible au casque du fait de la détection plaque et de la cellule de filtrage pour la haute tension alimentant la détectrice, la préamplificatrice et l’écran du tube final. Un transformateur 220 V / 6 V prévu pour 10 W remplace de façon honorable le transformateur de sortie spécial BF très difficile à trouver. L’utilisation de 2 potentiomètres de gain en entrée et en sortie du récepteur permet de se placer dans les conditions optimales de rapport signal / bruit. Le potentiomètre modifiant la tension d’écran de l’oscillateur sert de réglage fin de la fréquence.
En dehors du circuit oscillateur, tous les bobinages sont des petites selfs moulées du commerce ayant la forme d’une résistance. Un circuit bouchon sur 5,068 MHz est placé dans le circuit antenne pour éviter l’entrée en directe de station émettant sur cette fréquence. Le couplage des bobines se fait en collant les 2 bobines l’une sur l’autre avec de la colle cyanolite. Sur 14 MHz un filtre de bande est employé, l’harmonique 2 de l’oscillateur permettant de recevoir les stations sur 13 MHz. L’oscillateur est un montage ECO à deux bobines indépendantes non couplées et non à une seule bobine avec prise intermédiaire. Le fil employé est du fil de câblage rigide de 0,2 mm2, correspondant un diamètre de 0,5 mm. Les bobines sont réalisées en vrac sur un corps de BIC de 8 mm de diamètre. Une fois faites, elles sont retirées du BIC, et restent donc « en l’air ». Après les derniers réglages, elles sont rigidifiées avec de la colle cyanolite. Pour les 3 gammes de 20 40 et 80 m, la fréquence de l’oscillateur est 9 12 8,5 MHz. Une capacité d’accord très importante est utilisée pour obtenir une stabilité suffisante. Ces capacités doivent être d’excellente qualité. L’accord est réalisé avec condensateur à air de radiodiffusion à transistors AM FM. La cage 20 pF est utilisée sur 7 MHz, la cage 120 pF (avec 220 pF en série) sur le 14 MHz, la cage 360 pF sur le 3,5 MHz avec 100 pF en série. Chaque gamme est donc étalée au maximum. Il n’y a pas de commutation des circuits oscillants, seuls les points de connexions au circuit oscillateur étant commutés. Dans ce montage le circuit oscillant d’entrée n’est accordé qu’en milieu de bande, ce qui simplifie le montage (pas de CV, pas d’alignement). Aucune perte notable n’a été remarquée par cette absence d’accord exact du circuit d‘entrée. C’est malheureusement un effet secondaire intéressant de l’étroitesse des bandes amateurs. Chaque changement de gamme se fait en maniant 2 séries de 3 petits interrupteurs qui sont des inverseurs miniatures 2 pôles. Il faut choisir de façon indépendante le circuit oscillant d’entrée et le circuit pour l’oscillateur. Ce système de commutation simpliste permet de bien différentier les circuits d’entrée et les circuits oscillateurs. Par ailleurs son endement RF est excellent tout en étant simple à réaliser. La phtographie centrée sur les 2 circuits oscillants d’entrée et oscillateur illustre la réalisation. A gauche du trait noir sont les circuits oscillateurs, à droite les circuits d’entrée. Pour chaque circuit oscillateur on observe de haut en bas L3 L4 (en jaune), le condenstaeur ajustable de 90pF et le double inverseur miniature (noir). Pour les circuits d’entrée 7 et 3,5 MHz, on observe nettement le condensateur ajustables et les self L1 L2 qui ressemblent à des résistances et sont collées l’une contre l’autre ainsi que le double inverseur. Sur 14 MHz le circuit d’entrée est un peu plus complexe du fait de la réalisation d’un filtre de bande. On observe donc 2 condensateurs ajustables, 2 jeux de 2 bobines couplées et le double inverseur.
Comme pour la détectrice à réaction le récepteur est construit sur un montage « chaise » réalisé avec 2 plaques de bakélite cuivrée de 20 sur 30 cm. Des résistances de 10 Mohms soudées à la masse sont utilisés comme point de connexion. Leur résistance élevée est totalement négligeable sauf pour la grille de la triode préamplificatrice AF. Une alimentation délivrant du 6 V pour les filaments et du 170 V pour la haute tension est utilisée. Je rappelle l’importance d’un interrupteur sur l’alimentation haute-tension afin d’éviter de s’électrocuter lors de modifications du recepteur. L’alimentation doit de préférence être indépendante du récepteur pour éviter un échauffement supplémentaire et une induction de 50 Hz dans les étages sensibles. Le cablage des filaments doit être fait avec 2 fils. Le transformateur hautetension est un transformateur d’isolement.
Les résultats sont à la hauteur des espérances. Le récepteur n’a rien à envier à un récepteur de trafic standard sans DSP. Seule l’absence d’affichage digital peut être déroutant. La stabilité est bonne, les stations pouvant être écoutées plus de 15 minutes sans retoucher l’accord. Il faut toutefois attendre un long préchauffage d’au moins une heure. C’est le principal défaut de ce montage. Au total cette réalisation montre que les récepteurs à lampes pouvaient être extrêmement efficaces sans peser 10 kg et utiliser plus de 10 tubes. Ecouter les radioamateurs avec ce récepteur où chaque pièce a son utilité est un véritable plaisir. Le défit serait de réaliser un récepteur similaire à semi-conducteurs et accord par diode varicap. Ce doit être possible. Nostalgiques des constructions d’entant à vos fers à souder !
Composants :
80 m : L1 = L2 = 22 µH. ; L3 = 2 spires ; L4 = 6 spires ; C1 = 690 pF (470+220)
40 m : L1 = L2 = 4,7µH ; L3 = 1 spires ; L4 = 4 spires ; C1 = 570 pF (470+100)
20 m : L3 = 2 spires ; L4 = 5 spires ; C1 = 690 pF (470+220)
Figure 1 : le récepteur
Figure 2 : filtre de bande 14 ,MHz
Figure 3 : Alimentation 6V ~ et 170 V =
Figure 5 : vue de dessus
Figure 6 : vue de dessous
Figure 7 bobinages