Émetteur
BLU phasing 40 et 80 m à tubes
Olivier
Ernst - F5LVG
Photos de la station émetteur et récepteur (3 MO, pdf)
Caractéristiques :
2 bandes : 80 m et 40 m
Puissance de sortie : > 100 W
Atténuation porteuse : 27 dB
Atténuation bande latérale
supérieure : 20 dB
Enregistrement à 600 km de distance, avec du QRM
Depuis plusieurs années, le matériel pour
réaliser des montages à tube est redevenu disponible grâce à
Internet. Les tubes ayant le meilleur rapport qualité-prix sont des
tubes russes n'ayant pas eu d'équivalence exacte en Europe ou
en Amérique. Grâce à Internet, il est facile de trouver les
caractéristiques de ces tubes. Maintenant que la technique radio
n'est plus à la mode, ayant été balayée par l'informatique, il
est aussi difficile de trouver des composants semi-conducteurs pour
la radio que des composants pour les lampes. Alors lâchez-vous :
revenez aux tubes ! Les tubes à vide ont l'avantage d'être
robustes, souvent de caractéristiques non critiques, et de présenter
des impédances élevées. Ce sont donc des composants idéals pour
la radio analogique en HF si on oublie leur taille, leur dissipation
calorifique et la nécessité d'employer des tensions élevées dès
que de la puissance est nécessaire. Avec les lampes, le nombre de
composants pour un montage, est nettement moindre qu'avec des
semi-conducteurs sauf s'il existe une puce toute faite. Mais alors,
il ne s'agit plus d'une construction amateur, mais du fabricant de la
puce. Je me suis donc remis avec bonheur aux constructions à tubes.
Voici en description un émetteur BLU (SSB) pour les bandes 40 et 80
m dont la totalité des composants se trouve sur internet, en
particulier sur les sites de ventes aux enchères.
Cet
émetteur BLU repose sur la technique phasing. En scindant le signal
audio en deux sources déphasées de 90° puis, en modulant 2 sources
radiofréquences déphasées elles aussi de 90°, il est possible
d'atténuer facilement la bande latérale supérieure ou inférieure.
Cette technique nécessite donc un déphaseur R.F. et un déphaseur
A.F. associés à deux modulateurs équilibrés. Mon émetteur
n'emploie donc aucun filtre à quartz ou mécanique.
Circuit
AF
Il est constitué de deux tubes 6N3P, ce
qui correspond à quatre triodes. Les 2 premières triodes amplifient
le signal provenant du microphone. La quatrième triode est utilisée
dans le circuit déphaseur audio fréquence. Le déphaseur proprement
dit comporte quatre condensateurs de 22 nF et quatre résistances de
2,2 kohm, 4,7 kohm, 10 kohm et 22 kohm. Ce déphaseur doit être
attaqué par deux signaux en opposition de phase et d'amplitude
différente. La valeur de la résistance cathode (2,2 kohm) ainsi que
celle de la résistance d'anode (11 kohm réalisée avec 10k et 1k en
série) de la triode d'attaque doivent donc être strictement
respectées. Je n'ai utilisé que des composants à 5 % de précision.
La plus grande difficulté est de trouver des condensateurs de 22 nF
supportant 300 V. Si ces condensateurs ont une précision moins bonne
que 5 %, je conseille de s'en procurer une dizaine et de les trier
pour prendre les quatre condensateurs les plus proches des 22 nF. Ce
déphaseur peut attaquer directement les modulateurs équilibrés du
fait de sa relativement basse impédance. Lors du réglage final, il
faudra modifier la résistance de cathode pour obtenir la meilleur
atténuation possible de la bande latérale opposée. Pour passer d'USB à
LSB, il suffit d'intervertir les 2 connexions de sortie allant vers le
modulateur.
Générateur
BLU 9,216 MHz
Ce circuit comprend une double triode 6N3P. La première triode est une oscillatrice pilotée par un quartz de façon classique. La deuxième triode est un étage tampon avec une sortie basse impédance sur la cathode. Le déphaseur R.F. est constitué de deux bras formés par un condensateur et une capacité en série. L'impédance du condensateur doit être identique à la valeur de la résistance pour la fréquence R.F. concernée. Les résistances de 78 ohms sont formées par 3 résistances en parallèle (100-470-1k5). À noter que la valeur d'une des 2 résistances sera modifiée lors du réglage final pour obtenir la meilleure atténuation possible de la bande latérale opposée. Chaque sortie du déphaseur R.F. est raccordée à une sortie du déphaseur A.F. pour attaquer le modulateur. Il est indispensable d'utiliser des diodes à faible tension seuil. Des diodes standards type 1N4148 sont sources d'une très importante distorsion, les faibles signaux BF inférieurs à la tension seuil ne provoquant aucune modulation. Il faut donc utiliser des diodes Schottky prévues pour les faibles signaux (1N60P, BAT41 et suivantes). Les quatre bobines utilisées sont des inductances miniatures du commerce. Ce nombre élevé d'inductances est nécessaire pour éviter l'emploi d'une bobine à point médian introuvable dans le commerce. Les condensateurs ajustables de 90 pF servent à accorder le modulateur sur 9 MHz. À noter que le réglage du primaire doit permettre d'obtenir le minimum de porteuse en position émission, l'interrupteur "tune" étant à la masse. Ce réglage est extrément précis. L'accord du secondaire se fait sur le maximum de signal obtenu en sortie en position "tune". L'interrupteur « tune » permet, quand il est ouvert, de déséquilibrer le modulateur et donc de laisser passer la porteuse ce qui permet de régler l'émetteur.
Le VFO utilise une lampe 6N23P identique à
l'ECC88. La première triode est un montage Colpitts classique. Des
valeurs très importantes de capacité sont utilisées pour obtenir
une stabilité en fréquence correcte. Les condensateurs fixes
faisant partie du circuit d'accord (C1 et C2) sont en mica argenté.
Il faut employer les valeurs les plus élevées possibles (4700 pF
pour 2 Mhz et 2200 pF pour 5 MHz). J'utilise des condensateurs
d'appoint de faible valeur pour caler exactement la fréquence. La
totalité du circuit oscillant (bobines, condensateurs fixes,
condensateurs variables, condensateurs ajustables) est commutée sur
5,616 MHz ou 2,166 MHz pour obtenir une émission sur 3,6 MHz ou
7,050 MHz. J'emploie un condensateur variable de 2X 300 pF. Une
cage est utilisée pour les 2 bandes, avec en série un condensateur
de 400 pF pour étaler toute la bande phonie du 80 m (VFO 5,616
à 5,416 MHz). Pour couvrir le 40 m, il faut y ajouter la deuxième
cage (VFO 2.166 à 2.016 MHz). Un accord fin est réalisé avec 2 diodes
1N4007 employées en varicap haute-tension. Le potentiomètre de 47k n'a
pas besion d'être démultiplié.
La deuxième triode est un
étage suiveur pour obtenir une sortie à basse impédance qui
attaque le tube mélangeur 6K13P. Il s'agit d'un tube à grille cadre
identique à l'EF183, permettant un grand gain. Le potentiomètre
situé dans le circuit de la cathode sert à choisir le point de
polarisation. Le réglage de ce potentiomètre doit donc être
accessible. La première grille reçoit le signal provenant du
modulateur équilibré. Le signal BLU sur 40 ou 80 m est disponible
dans le circuit anodique de la lampe. Remarquez le condensateur de
470 pF qui relie la cathode du tube mélangeur à la masse. Ce
condensateur est indispensable pour diminuer au maximum la contre
réaction induite par l'absence de découplage de la cathode. Ce
condensateur augmente donc très nettement le gain de conversion,
sous réserve qu'il n'atténue pas trop le signal venant du VFO. Sa
valeur est donc relativement critique.
Le couplage entre la
lampe mélangeuse et le driver est critique. Le plus efficace est un
circuit en pi accordé avec une faible capacité. Avec ce circuit, la
tendance à l'accrochage est extrêmement faible et l'excitation du
driver est maximum. Les bobines employées sont des inductances
miniatures du commerce. L'ensemble inductance - condensateurs est
commuté pour chaque bande. Il ne faut aucun accrochage sur charge
fictive. Le potentiomètre de 47K permet de supprimer certains
accrochages qui surviennent sur antenne réelle en amortissant le
circuit oscillant. Bien mis au point, l'émetteur doit toujours être
stable avec le potentiomètre réglé à 47K.
Le driver est
constitué de trois lampes 6E5P en parallèle, ce qui augmente la
puissance disponible en sortie. La bobine de sortie L3 est réalisée
en l'air et est commutée pour chaque bande ainsi que les
condensateurs ajustables de couplage. La puissance de sortie est
comprise entre 6 et 8 W.
Amplificateur de puissance
100 W
Il est réalisé sur une platine séparée.
Il comprend 5 lampes 6P7S en parallèle. Ces tubes sont proches des807,
mais avec un culot octal et un prix souvent moindre. L'entré de
l'amplificateur est apériodique, ce qui permet un bonne stabilité sans
neutrodynage. La polarisation est simplement obtenue par des diodes
1N4007 en série (0,7V par diode). Il est possible d'employer une
haute-tension plus élevée ce qui augment la puissnce de sortie. À 750V
il faut mettre 50 diodes. Le circuit de sortie est un circuit en PI. La
self de choc est une
simple bobine d'au moins 50 spires avec un diamètre de 4 cm en fil de
cablage. La
bobine L4 est réalisée en fil d'installation 10A (1,5 mm2).
Elle comprend 8 spires
(diamètre 40 mm) pour le 40 m et 11 spires (diamètre 65 mm) pour le
80 m. Il faut que la bobine ait une valeur suffisante pour qu'il soit
impossible de s'accorder sur l'harmonique de la fréquence voulue.
L'accord doit donc être obtenu avec une faible capacité.
La mise au point de cet émetteur est complexe. Les principales difficultés sont la stabilité en fréquence, l'absence d'accrochage R.F., l'obtention de la puissance maximale, la suppression de la porteuse et l'atténuation de la bande latérale opposée. La valeur des bobines d'accord est toujours critique. Le meilleur rendement n'est obtenu que pour une valeur particulière. C'est la plus grande difficulté de ce montage. Les bobines du VFO sont réalisées en l'air avec du fil électrique d'installation 20 A (2,5 mm2). Un ou deux petits fils électriques entourant les spires permettent de tenir une rigidité suffisante. Pour le VFO, quand tout est au point, il faut encore mettre la colle cyanolite sur les spires pour les solidariser parfaitement. Les bobines du VFO ont un diamètre de 22 mm qui correspond diamètre d'une lampe noval ! Le changement de bande s'effectue sur l'exciteur par des doubles inverseurs miniatures. J'en emploie 4 : pour la cathode et le circuit grille de la triode du VFO, pour L2 avec les condensateurs associés, pour L3, et pour les condensateurs de couplage vers le PA. Un seul de ces inverseurs est mis sur la face avant. En effet, il faut privilégier des connexions courtes. Trois des inverseurs sont donc au milieu des lampes sur la plaque horizontale. Pour éviter tout risque d'électrocution, il est donc impératif qu'aucune haute tension non protégée ne soit présente sur la face supérieure du montage. La bobine L4 du PA est interchangeable sur fiches bananes.
Il faut encore prévoir un
système de commutation « réception-émission et tune ».
J'utilise 2 interrupteurs miniatures. Le premier est l'interrupteur
émission réception. Il commande 2 relais. Le premier applique le +
300 V à la lampe mélangeuse et au driver en émission. Le
deuxième relais court-circuite la sortie du driver à la masse en
réception et commande la bascule du relais d'antenne, situé dans la
boite de couplage, du récepteur vers l'émetteur. Pour le tune, un
simple interrupteur
déconnecte de la masse les 2 résistances de 470 kohm du modulateur.
Il faut bien entendu que l'interrupteur émission-réception soit sur
la position émission. Pour des facilités d'utilisation, la pédale
du micro est en parallèle de l'interrupteur émission-réception. Le
passage en émission devient donc instantané.
Le réglage de fréquence
se fait simplement par battement nul avec l'émetteur en position
émission par l'interrupteur. Au niveau du récepteur j'ai un
interrupteur manuel de stand-by qui coupe la sortie casque et
l'arrivée d'antenne.
Le montage est réalisé sur des plaques de bakélite cuivrée 20x30 cm. Ces plaques sont fixées sur cadre en bois en forme de U pour l'exciter et de carré pour le PA. Le cadre en bois est réalisé avec des planches de 10 cm de large. Il a fallu blinder ces planches pour l'émetteur. Cela s’est fait facilement avec de l'aluminium adhésif de 5 cm de large vendu dans les magasins de bricolage. À noter qu'il est impossible de souder de l'aluminium et qui faut prévoir un contact par vis.
Aujourd'hui, les logiciels de simulation
permettent facilement de concevoir de façon empirique de tels
circuits déphaseurs, avec des valeurs normalisées et une impédance
plus basse. Personnellement, j'ai utilisé le logiciel libre Qucs
sous GNU Linux pour rechercher des valeurs simples pour le circuit de
W2KUJ. Le déphaseur idéal donne deux sources A.F. déphasées de
90° et de même amplitude. Si l'amplitude est différente, la valeur
en tension de la bande indésirable est approximativement égale à
la moitié du pourcentage d'erreur. Par exemple, si un des signaux
A.F. est 10 % plus intense que celui de l'autre canal, le signal de
la bande latérale indésirable sera de 0.05 (5%) ce qui correspond à
26 dB. Si le déphasage n'est pas strictement de 90°, la valeur de
la bande latérale indésirable est égale à la tangente de la
moitié de l'erreur d'angle. Par exemple, si le déphasage entre les
deux sources A.F. est de 95°, le signal de la bande latérale non
désirée sera de 0,043 (tg 2,5) qui correspond à 27 dB
d'atténuation. Je me suis fixé 20 dB d'atténuation de la
bande latérale supérieure. Quand la puissance émise est de 100 W
pour la bande latérale inférieure, la puissance de la bande
latérale supérieure émise est donc de 1 W. Ce n'est pas une
suppression complète, mais cette atténuation me semble bien
suffisante pour une réalisation 100 % amateur, de puissance R.F.
modérée. Bien entendu, cette situation deviendrait insuffisante
avec une puissance de sortie nettement plus élevée (500 W par
exemple).
Voici les caractéristiques de mon déphaseur,
après simulation avec le logiciel Qucs. Ce logiciel ne permettant
pas une étude avec les tubes électroniques, la simulation a été
faite avec un transistor. Pour l'adaptation aux tubes, il suffit de
multiplier par 10 R2 et R4. J'ai commencé à délibérément choisir
4 capacités de 22 nF, pour acheter un lot supportant la haute
tension et ayant une précision de 5%. La valeur de 22 nF a été
choisie car elle permet d'obtenir une impédance suffisamment faible
de l'ensemble du circuit pour attaquer directement l'étage mélangeur
équilibré. Ensuite, la valeur des résistances a été déterminée
empiriquement. En pratique je n'ai essayé que des valeurs
normalisées de résistance. Du fait de l'emploi d'un élément
actif, le circuit n'induit pas de perte (gain proche de 1). La
simulation, comme un essai réel, ont montré que le déphaseur
pouvait directement attaquer le modulateur équilibré.
Pour obtenir une suppression de 20 dB il est indispensable de régler le mieux possible les 2 déphaseurs. En pratique, il suffit d'ajuster une seule résistance de chaque déphaseur. J'ai choisi à chaque fois la résistance reliée à la masse que j'ai remplacée momentanément par une résistance ajustable. En écoutant l'émission en local sur 40 ou 80 en USB, il faut choisir la position avec le plus faible signal et la modulation la plus déformée. Dans mon cas, pour le déphaseur RF j'ai remplacé la résistance de 78 ohm par une 33 ohm, et pour le déphaseur AF la résistance de cathode calculée à 2,2 kohm a été remplacée par une résistance de 3,3 kohm. Avec les valeurs théoriques, l'atténuation ne dépassait pas 6 dB. Il est facile d'obtenir après réglage 15 dB, et même 20 dB avec un réglage fin mais quasi impossible de dépasser cette atténuation.
Emetteur SSB junior « SSB, JR. », GE Ham
News November-December 1950
Schéma
du « Single Sideband Generator, model 51SB-B, B&W » avec
déphaseur 2Q4
F5LVG octobre 2011