Les postes à galène (à diode) au XXI siècle

suivi d’un poste à 2 transistors


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Article en PDF (version de 2017)


Durant le XX siècle, le premier récepteur radio construit par un amateur était souvent un poste à galène ou à diode.


Ces récepteurs étaient constitués par les 4 éléments suivant :

1 Un ensemble antenne terre pour recevoir les ondes désirées, en général PO (MW) ou GO (LW) parfois les ondes courtes (OC, SW).

2 Un système d’accord composé par une ou plusieurs bobines associées à un ou plusieurs condensateurs variables. Ce système permet de sélectionner la fréquence désirée.

3 Une détection par galène ou diode. Un détecteur par galène consiste en un fin fil métallique faisant pression sur un cristal de galène. En certains points dits « sensibles », du fait de certaines impuretés, ce système devient une diode. Dès 1947 (voir Giniaux), il a été proposé de remplacer la galène par une diode miniature, le plus souvent la 1N34. La détection, en redressant les courants hautes fréquences reçus, permet de démoduler les émissions en modulation d’amplitude.

4 Un casque pour entendre la station désirée.


Nous verrons successivement un premier exemple de réalisation pratique identique aux récepteurs d'il y a un siècle puis un deuxième exemple employant un détecteur sensible à 2 transistors et enfin une bibliographie de langue française.



Pendant des décennies, les français de métropole pouvaient écouter en grandes ondes plusieurs stations francophones : France-Inter, Europe 1, RMC et RTL. Ces émetteurs étaient de grands consommateurs d’énergie (6 200 MWh mégawattheure par an pour RTL) et la réception de qualité de plus en plus médiocre du fait de nombreux parasites dus aux alimentations à découpage (une simple lampe LED peut brouiller ces fréquences), les relais CPL etc. Pour des raisons d’économie, ces stations quittent donc les grandes ondes. France Inter a arrêté son émetteur le 1er janvier 2017 (il persiste une porteuse de plus faible puissance pour des signaux horaires), Europe 1 le 1er janvier 2020, RMC le 28 avril 2020 et RTL le 2 janvier 2023.


Seul reste le poste anglais BBC4 sur 198 KHz si vous habitez dans le nord ouest de la France. Les postes à galène seront bientôt totalement muets.

 



1 Éléments constitutifs d’un poste à galène


1.1 Circuit Antenne Terre


On remarque que le récepteur à galène ne comporte aucune alimentation. Seule l’énergie reçue par le circuit antenne terre permettra de rendre audible une station radio. L’antenne doit donc être très efficace. En pratique, elle doit être la plus haute et la plus longue possible, au moins 20 mètres pour un poste sans alimentation. Pour les radioamateurs, il est en général possible d’utiliser l’antenne d’émission décamétrique en reliant ensemble les 2 fils de descente (cas de l’antenne Levy, par exemple) ou l’âme et la tresse d’une descente coaxiale. Une bonne prise de terre pour courant secteur est normalement suffisante. Il est parfois préférable d’utiliser une prise de terre spécifique pour une station radioamateur.


1.2 Circuit d’accord


Le circuit d’accord sert à sélectionner la station désirée. Il est basé sur un circuit oscillant formé d’une bobine L et d’un condensateur variable C. Cinq modes de couplage sont possibles : en direct, électrostatique, Oudin, Bourne et Tesla. Le direct est le moins sélectif, le Tesla le plus sélectif. En l’absence de station locale « écrasant tout », je conseille le montage électrostatique. En général, sur les schémas, la diode est reliée directement au circuit oscillant. Je conseille au contraire de la coupler au circuit oscillant par une deuxième bobine placée juste à coté. En présence d’une station locale, je conseille le montage Tesla. Pour ce montage, contrairement au schéma, un seul condensateur variable est employé au primaire : série ou parallèle.




Vous pouvez construire les bobines. Pour une bobine cylindrique artisanale, le diamètre minimum est de 2,5 cm, mais 4 cm sont préférables. La longueur du bobinage ne doit pas dépasser 2,5 fois le diamètre. Le fil pour wrapping (30AWG) est excellent pour réaliser ces bobines en PO et GO. Il est nettement plus facile d’utiliser des bobines miniatures toutes faites de la taille d’une résistance (100 à 330 µH pour les PO, 2,2 à 4,7 mH pour les GO).


Les condensateurs variables conseillés ont en général une valeur de 450 à 500 pF. Aujourd’hui de tels condensateurs sont difficiles à trouver. Sur internet, on peut trouver des petits condensateurs plastiques pour transistors. Deux modèles sont intéressants :

- 443df. Ce modèle comporte 4 cages : 2 x 126 pF et 2 x 20 pF. En mettant toutes les cages en parallèle on obtient 292 pF.

- 223p. Ce modèle comporte 2 cages : 140 pF et 60 pF. En mettant toutes les 2 cages en parallèle on obtient 200 pF.

Pour ces 2 modèles, il est facile de visser une vis M2.5 x 20mm dans l’axe central pour y fixer un bouton de commande. Faites attention de bien immobiliser l’axe central avec une pince pendant que vous vissez cette vis. Sur le dessous de ces condensateurs variables, il existe un petit condensateur ajustable (trimmer) pour chaque élément. Il faut impérativement les régler au minimum.


Pour couvrir la gamme des GO, 200 pF suffisent largement. Seules deux stations sont audibles sur 234 kHz et 198 kHz (RTL, BBC1). À l’inverse, 292 pF ne permettent pas de couvrir la totalité de gamme PO avec un poste à galène, la bande de fréquences allant de 1605 kHz à 525 kHz. Il faut donc soit changer de bobine, soit mettre 2 condensateurs en parallèle.


1.3 Détecteur


Vous emploierez probablement une diode. Même si la 1N34 existait déjà en 1947, elle est toujours fabriquée avec des variantes (1N34A). La faible impédance du couple « diode détectrice - casque » amortit le circuit oscillant, ce qui explique l’intérêt de le coupler par une deuxième bobine au circuit oscillant en cas d’accord électrostatique.


La diode 1N34A est toujours fabriquée. Bien entendu, il ne s’agit pas du même type de fabrication que celle utilisée à son origine en 1946 par Sylvania. En pratique, les modèles actuels sont des équivalences. Il existe 2 modèles différents. Il s’agit toujours d’une diode au germanium, mais soit du type pointe (on voit le fin fil qui est relié au cristal, comme un détecteur à galène miniature) soit du type jonction Schottky. Le type pointe est le plus proche du type d’origine. Pour un poste à diode, le modèle importe peu. Par contre, dans certains autres montages, il faut employer le type pointe (le plus cher), car la résistance dans le sens inverse est plus faible que le modèle à jonction. Ainsi seules les diodes 1N34 du type pointe permettent d’avoir la connexion d’entrée à un potentiel non défini par rapport à la masse (en pratique le signal est amené à la diode par un condensateur, sans aucune résistance allant à la masse). Pour différentier les 2 types de diodes, il suffit de regarder si on visualise un petit fil rejoignant un cristal. Si c’est le cas, il s’agit d’une diode pointe, à l’inverse, une diode à jonction. La diode 1N60p est une diode Schottky germanium parfaitement adaptée pour la détection.


Il ne faut pas employer de diode à jonction au silicium (1N4148 par exemple), la tension de jonction du silicium étant de 600 mV au lieu de 200 mV pour le germanium. La sensibilité serait très nettement diminuée.


1.4 Casque


Il faut un casque sensible à haute impédance (au moins 2000 ohm). De tels casques sont quasi introuvables. Deux solutions sont donc possible : soit employer des écouteurs piézoélectriques, soit employer un casque basse impédance précédé d’un transformateur abaisseur.


Les écouteurs piézoélectriques sont encore trouvables. Ils sont basés sur un cristal piézoélectrique se déformant en fonction de la charge à ses bornes. En mettant deux écouteurs en séries, on obtient à peu de frais un casque haute impédance sensible. Il faut toutefois ajouter une résistance (22 kohm, par exemple) en parallèle pour décharger la charge en courant continu à ses bornes. En effet les cristaux piézoélectrique sont isolants en courant continu. Ce type d’écouteur favorise très nettement les aiguës.


À noter que des buzzers piézoélectriques permettent de fabriquer des écouteurs à peu de frais. Il faut des buzzers piézoélectriques passifs. Je conseille un diamètre de 17 mm, en effet ils peuvent tenir directement dans le pavillon des oreilles. On peut aussi y coller un embout auriculaire. Une sortie par broche est plus solide qu’une sortie à fil. La sensibilité est toutefois un peu plus faible qu’avec de véritables écouteurs.


Les casques ou les écouteurs dynamiques modernes sont à basse impédance, en général 32 ohms. Ils sont basés sur le déplacement d’une bobine mobile au sein d’un aimant sous l’influence du courant audio. Il faut les faire précéder d’un transformateur adaptateur d’impédance. Les transformateurs prévus pour des petites alimentations secteurs conviennent parfaitement. J’utilise avec succès un transformateur 220V / 6V 300mA. Si vous achetez un transformateur pour cette application, choisissez la plus faible puissance possible (< 2W). Le choix du casque est plus difficile. La sensibilité d’un casque se mesure en dB. Il y a plus de 25 dB de différence entre les casques, ce qui correspond à une gain en tension de plus de 16. Il est donc indispensable de choisir un casque ayant une sensibilité entre 120 et 123 dB. Certains écouteurs intra auriculaires (in-ear) moins chers ont la même sensibilité. La liaison directe entre l’écouteur et le conduit auditif permet une bonne écoute. Ce sont ces modèles intra auriculaires qui se révèlent les plus efficaces et qu’il faut donc privilégier.


Pour les modèles stéréos, deux branchements sont possibles : soit mettre les écouteurs en série (souvent le meilleur) soit en parallèle. Le mieux est de tester les deux modes de branchement.


L’emploi d’un casque ou d’écouteurs modernes permet d’apprécier la qualité des émissions en modulation d’amplitude qui est nettement moins mauvaise que ce que nous avons l’habitude d’entendre.


Il est donc possible de se procurer encore aujourd’hui toutes les pièces pour réaliser un poste à diode.



2 Réalisation d’un poste à diode moderne


Voici un exemple de réalisation de 2017. En 2017, avec une antenne Levy de 2 X 10 m et 20 m de descente, près de Lille on reçevait en journée 4 stations : 234 kHz RTL, 198 kHz BBC et 183 kHz Europe 1 en
grandes ondes ainsi que la station belge francophone (RTBF) sur 621 kHz en petites ondes. Le soir d’autres stations plus lointaines sont audibles en PO. En 2023, il ne reste que la station de la BBC en journée.



Le montage se fait sur une planchette de bois avec des clous. J’ai choisi de couper la bande PO en 2 gammes. La commutation entre les 3 jeux de bobines pour recevoir les GO ou les PO se fait avec des petites fiches bananes de 2 mm. Si vous n’êtes pas à proximité d’un émetteur étranger, la bande PO est désormais inutile du fait de la disparition des stations françaises sur cette bande. J’ai observé que mettre 2 diodes 1N60p en parallèle donnait une meilleure sensibilité qu’une diode unique. Le condensateur de 1 nF n’est pas utile avec les écouteurs piézoélectriques.





3 Poste à 2 transistors GO


La problématique est double : trouver un détecteur suffisamment sensible pour employer une antenne intérieure d’un à deux mètres et un casque à faible impédance, sans passer par un transformateur. En remplaçant la détection diode par une détection à transistor suivie par un deuxième transistor en amplificateur Darlington, on arrive au résultat escompté. Ce montage nécessite une alimentation électrique. Une tension d’alimentation de 1,5V (pile AA) est bien suffisante et aura une longue durée de vie. Si vous employez une tension supérieure, il faudra alimenter la résistance de 10 Mégohms via un dispositif potentiométrique afin de conserver un point de fonctionnement juste au dessus du cut off. En effet, la détection s’obtient en polarisant le premier transistor juste au-dessus du cut off. Avantage de ce fonctionnement, l’impédance du transistor d’entrée est nettement plus élevée que celle d’une diode, du fait d’un fonctionnement à très faible courant collecteur. Il est donc possible de le coupler directement au circuit oscillant, en cas de couplage électrostatique.


La prise de terre, qui peut être celle du courant secteur, reste indispensable. Le casque est un modèle moderne de 32 ohms d’impédance. Le résultat de cette association de 2 transistors est spectaculaire. Ce récepteur peut bien entendu fonctionner aussi sur antenne extérieure. Si des stations OC ou PO sont reçues, il suffit de mettre en série avec le condensateur de 100 nF une self de 2,2 mH. Vous pouvez bien entendu essayer tous les types de circuits d’accord décrit avec les postes à galène.








4 Bibliographie francophone


Pour terminer, voici 5 références sur les postes à galène :


Dr Pierre Corret : L'hôpitodyne : principes de bonnes construction en T.S.F. 1932

Alain Boursin : 15 postes modernes à galène (1939)

Georges Giniaux : les postes à galène et les récepteurs à cristaux modernes : germanium et silicium (1947)

Géo Mousseron : Les postes à Galène modernes (1950)

Charles Guilbert : Récepteurs à galène et à un ou deux transistors (1972).



Olivier Ernst

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